Lettre au Maire
Le Comité de Sauvegarde de la Baie de Cavalaire (CSBC)
Vivre dans la Presqu’ile de Saint Tropez (VIVRE)
L’Union Départementale pour la sauvegarde de
la Vie, de la Nature, et de l’environnement (UDVN 83)
Lettre ouverte à Madame le Maire de Cavalaire, Cavalaire le 17 janvier 2014
Madame le Maire,
Lors de vos vœux aux Cavalairois le 10 janvier (*), vous avez évoqué le recours déposé contre le PLU (Plan Local d’Urbanisation) de la ville, par les associations de défense de l’environnement. Ce fait ne prêterait pas à commentaires si la forme de votre déclaration avait été plus complète et plus objective.
Ce que nous avons à préciser aujourd’hui dans cette « lettre ouverte » ne sera pas nouveau pour vous, car comme vous l’avez bien indiqué, nous nous sommes rencontrés de nombreuses fois, et presque tout dit. Nous pourrions ajouter que nos échanges ont été complets, détaillés, précis et, il convient de le reconnaître qu’ils se sont toujours déroulés dans un bon climat. Mais il nous est apparu indispensable d’apporter un éclairage, un complément d’informations aux 1000 personnes qui ont entendu votre message, qui visitent votre site web, ainsi qu’à nos adhérents, nos sympathisants et aux lecteurs du quotidien local qui a relaté votre intervention.
Extrait de votre intervention : « malgré les échanges, malgré les discussions, ces associations n’ont pas accepté les projets que nous proposons sur les terrains des Canissons et du Jas »
Durant l’élaboration du PLU, nous ne nous opposions pas aux projets des Canissons et du Jas, le critère « logements destinés à des actifs cavalairois » était décisif pour nous inciter à accepter ces programmes d’urbanisation, bien que dommageables pour l’environnement. Comme vous, nous pensons que la construction de logements pour les actifs doit être une action prioritaire à mettre en œuvre par la municipalité.
Ces réalisations dans le contexte d’une bonne maîtrise de l’urbanisation sur l’ensemble de la commune auraient été acceptables, mais le PLU proposé ne répond pas à ce critère, ni à une règle imposée par le SCoT (Schéma de Cohérence Territoriale), qui est le document de référence sur lequel doit s’appuyer un document d’urbanisme. Le SCoT impose un taux de croissance maximum des constructions de 1% par an, à Cavalaire entre la mise en vigueur du SCoT en 2006 et 2013 ce taux est de 1.89% par an, et la croissance annuelle jusqu’à l’échéance du SCoT, 2016, autorisé par le PLU est au minimum de 1.35%.
Même si nous faisions abstraction de cette obligation du SCoT il serait quand même aisé de déduire que les possibilités de constructions offertes par le PLU sont déraisonnables.
Constructions possibles sur 6 terrains urbanisables bien ciblés :
- camping des Canissons : 229 logements (cf. projet PROGIM sélectionné par la municipalité),
- projet du Jas : 75 logements (cf. projet COTHAM sélectionné par la municipalité),
- camping de la Pinède : 80 logements. (Estimation faite par analogie au projet du Jas),
- camping de la Baie : 100 logements (cf Rapport de présentation du PLU),
- les 2 zones AUEa (quartier du Jas et des Rigauds) 15 logements (cf. Rapport de présentation du PLU),
Soit au total : 499 logements.
A ce nombre déjà important il convient d’ajouter tous les autres logements dont la construction s’effectuera dans les années à venir : petits immeubles collectifs, maisons indépendantes, extensions, etc.
Comment concevoir qu’une localité comme Cavalaire qui comprend déjà un si grand nombre de logements vides durant au moins 9 mois dans l’année puisse se voir raisonnablement dotée à court terme d’une telle quantité de constructions ? L’argument auquel nous sommes sensibles, le besoin de logements pour les actifs ne peut en aucun cas justifier la possibilité d’un accroissement aussi important du parc immobilier et surtout des résidences secondaires.
Extrait de votre intervention : « En effet, malgré nos échanges, malgré nos discussions, ces associations n’ont pas accepté les projets que nous proposons sur le terrain des Canissons et du Jas. Et sans attendre même, le dépôt des permis de construire, ont écrit à Monsieur le Préfet et aux aménageurs concernés, afin de leur signaler qu’ils attaqueraient ces permis. »
Les raisons de cette démarche doivent être considérées comme régulières :
La Préfecture est l’administration de tutelle de la commune, elle a analysé et critiqué le PLU. Il est en conséquence normal qu’elle soit informée de l’évolution de celui-ci, de son acceptation par la population concernée ou des difficultés que son application rencontre.
Nous avons donc informé Monsieur le Préfet de toutes les réserves que nous avons formulées sur le PLU, nos remarques lors de l’enquête public, notre recours gracieux, notre recours contentieux, et notre décision d’intervenir contre les permis de construire qui selon nous s’appuient sur un document d’urbanisme fragilisé car entaché d’illégalités. Par souci de clarté dans nos relations vous avez été chaque fois destinataire de toutes ces communications.
Quant à notre courrier aux aménageurs, que vous avez aussi reçu en copie, il était motivé par la même volonté de transparence. Nous avons estimé que ces sociétés devaient être parfaitement informées de l’exposition de leurs projets.
Extrait de votre intervention : «Quelles étaient ces discussions au moment de l’élaboration du PLU ?
Je suis extrêmement surprise de cette levée de boucliers contre le Jas. Ce projet n’avait fait l’objet d’aucune remarque de leur part, bien au contraire.
Concernant les Canissons.
En contrepartie d’une acceptation du projet, il nous était demandé d’inscrire dans notre document d’urbanisme, une inconstructibilité de deux terrains, celui du camping de la Baie et celui du camping de la Pinède.
Le conseil Municipal majoritaire n’a pu répondre favorablement à cette demande impérieuse. »
Dans ces quelques phrases il y a du vrai, du faux, du non-dit et de l’abus de langage.
Le vrai : durant l’élaboration du PLU nous ne nous étions pas opposés au projet du Jas, pas plus que nous nous étions opposés au projet des Canissons. Ceci est incontestable, plusieurs documents en attestent. Dans nos observations lors de l’enquête publique nous avions seulement fait une remarque sur la hauteur des bâtiments des Canissons qui ne devraient pas excéder 12m ou 3 étages à l’image du Domaine des Lavandiers situé de l’autre côté de la rue.
Le faux : nous n’avons jamais en contrepartie d’une acceptation du projet des Canissons, demandé d’inscrire dans le PLU, une inconstructibilité de deux terrains, celui du camping de la Baie et celui du camping de la Pinède.
Le non-dit : nous étions prêts à accepter le PLU sous réserve :
- que toutes possibilités d’urbanisation dans l’environnement immédiat de Pardigon soient écartées, le camping Roux, et une parcelle située sur le site classé,
- que les deux campings, de la Baie et de la Pinède soient inscrits en UJ.(qualification d’un terrain de camping, c’est le cas de tous les autres campings de la commune),
- que la hauteur des bâtiments des Canissons ne dépasse pas 3 étages, sauf pour la partie hôtelière qui pourrait en comporter 4, nous nous étions rangés à votre requête.
Aucune de ces conditions n’a été retenue
Madame le Maire, soyez modérée dans vos propos. Nous vous aurions formulé « une demande impérieuse » ! Vous le savez bien nous sommes des interlocuteurs raisonnables, pas des jusqu’au-boutistes, ces mots n’appartiennent pas à notre langage.
L’abus de langage : « une inconstructibilité de deux terrains, celui du camping de la Baie et celui du camping de la Pinède. »
S’il est vrai que dans une zone classée en UJ on ne peut pas construire un immeuble d’habitation, utiliser le terme inconstructibilité en face d’un public qui n’est pas informé des terminologies de l’urbanisme sans l’assortir d’informations complémentaires relève effectivement d’un abus de langage.
Vous auriez du préciser qu’un terrain classé UJ peut devenir constructible par une simple modification du PLU.
On ne peut pas proposer de meilleur exemple : les auteurs du PLU de 2005 avaient renoncé à urbaniser la partie restante du camping de la Baie, cependant deux ans plus tard à l’occasion d’une modification de ce PLU, malgré notre opposition, ce zonage UJ est devenu UC, donc urbanisable, ceci ne vous a pas échappé.
Extrait de votre intervention : « Ces deux propriétés,(camping de la Baie et de la Pinède) aujourd’hui en activité commerciale, et de l’avis de leurs propriétaires, devant le rester encore quelques 10 à 15 années, voire plus, … sont situées en plein cœur de Cavalaire et forment les réserves foncières du développement futur de notre commune.
Nous ne pouvons aujourd’hui, lorsque nous élaborons un document d’urbanisme d’une durée de vie de 10 ans, obérer les possibilités de développement d’un territoire sur du plus long terme. »
Là encore vous faites un curieux mélange du vrai, du faux, du non-dit.
Qui peut raisonnablement affirmer : « les propriétaires resteront encore quelques 10 à 15 années, voire plus dans l’activité de camping. »
« Ces propriétés sont situées en plein cœur de Cavalaire et forment les réserves foncières du développement futur de notre commune. » C’est exactement ce que nous vous avons dit et écrit, d’où la nécessité de préserver ces derniers espaces. Il serait fâcheux qu’une urbanisation se réalise à court terme, ce que permet le classement proposé par le PLU. La possibilité de construire doit être mise en réserve pour le futur, dans une dizaine d’années peut-être, car il est certain que nous aurons à ce moment épuisé la totalité de nos réserves foncières qui sont très faibles donc très précieuses.
« Nous ne pouvons aujourd’hui, lorsque nous élaborons un document d’urbanisme d’une durée de vie de 10 ans, obérer les possibilités de développement d’un territoire sur du plus long terme. »
Vrai dans la forme, mais faux dans la pratique. Si un PLU est normalement prévu pour 10 ans, il fait en général l’objet d’une ou plusieurs modifications avant d’arriver à son terme. Dans notre cas, comme dans les 12 communes du golfe de St-Tropez, le PLU devra être mis en conformité avec le SCoT lorsqu’il sera révisé en 2016, en conséquence des ajustements pourraient être envisagés à cette occasion.
Nous conclurons par nos regrets de ne pas avoir pu aboutir à un compromis acceptable qui aurait permis de doter la commune d’un document d’urbanisme solide et remplissant les critères conformes à une maîtrise satisfaisante de l’urbanisation.
Nous avons déployé beaucoup d’énergie afin d’atteindre ce but mais nous n’avons pas été entendus. Nous n’avons pas la même conception de la concertation. Selon nous la concertation est l’action pour plusieurs personnes de s’accorder en vue d’un projet commun. Ce projet c’était le PLU que les Cavalairois comblés de vivre dans cette si belle cité attendaient. Nous devions leur dire qu’ils ont été trompés, c’est l’objet de cette lettre. Les juges auront eux à dire si les associations de défense de l’environnement avaient raison de contester le PLU de Cavalaire.
Afin de lever toute ambigüité nous redisons que les associations de défense de l’environnement agissent dans une parfaite neutralité. Elles ne soutiennent ni ne critiquent aucune liste électorale.
Veuillez agréer, Madame le Maire, nos respectueuses salutations.
Henri Bonhomme
Président du Comité de Sauvegarde de la Baie de Cavalaire
Désigné mandataire par les associations de défense de l’environnement pour les recours contentieux contre le PLU de Cavalaire.
(*) Texte intégral du discours en pièce jointe: Voeux du Maire 2014