Les médias comme les politiques se sont montrés discrets en 2016 sur cette question combien sensible. Ce que l’on peut retenir :
Situation d’attente ?
Il convient de rappeler que la Méditerranée est une mer fragile, riche d’une biodiversité exceptionnelle. Une mer fermée est infiniment plus vulnérable qu’un océan brassé par le mouvement des marées. Les conséquences d’une pollution de ce milieu précieux, comme d’un littoral vivant essentiellement du tourisme, seraient évidemment catastrophiques.
L’espace méditerranéen est déjà victime de la pollution de l’air, de l’eau, des sols, de la surexploitation des ressources marines, d’une forte densification de l’urbanisation littorale, d’un intense trafic maritime – 25 % du commerce maritime mondial d’hydrocarbures passent par la Méditerranée – avec toute la pollution qu’il génère. Faut-il y ajouter les risques de pollution dûs à de nouvelles exploitations pétrolières?
Que disent les politiques :
Ségolène Royal ne veut plus de recherches d’hydrocarbures en Méditerranée (Le Monde 9avril 2016).
La ministre de l’écologie va appliquer un moratoire « immédiat » sur les permis de recherche d’hydrocarbures dans les eaux françaises.
Le pétrole est vraiment devenu indésirable en Méditerranée. Ségolène Royal l’avait déjà laissé entendre. Vendredi 8 avril, elle a saisi l’occasion de la deuxième conférence nationale de l’océan pour l’affirmer à nouveau avec force. La ministre de l’environnement a annoncé un « moratoire immédiat sur la recherche d’hydrocarbures en Méditerranée », compte tenu des « conséquences dramatiques » que pourrait avoir un accident dans cette mer quasi fermée. « Je n’accorderai plus aucun permis d’exploration, ni dans les eaux territoriales, ni sur le plateau continental », a-t-elle insisté.
Les eaux du sud de la France font actuellement l’objet de deux demandes de prospection de compagnies britanniques. La société Melrose, qui voulait explorer les fonds marins à une trentaine de kilomètres des côtes des Bouches-du-Rhône et du Var, avait demandé le renouvellement du permis Rhône-Méditerranée, ce que le gouvernement lui a refusé par deux fois. Mais l’affaire, qui est passée devant le Conseil d’État en décembre 2014, n’est toujours pas close sur le plan juridique. Une autre requête, Rhône-Est maritime, déposée par Panoceanic Energy Limited, était également en cours d’instruction par le gouvernement. L’annonce de la ministre devrait a priori la stopper.
Mme Royal n’a pas évoqué les militants écologistes qui ont tout mis en œuvre pour perturber la rencontre des grandes compagnies pétrolières et gazières à Pau (Pyrénées-Atlantiques), à l’occasion du sommet Marine, Construction and Engineering sur le pétrole offshore et le forage en eau profonde du 5 au 7 avril. Son annonce sonne néanmoins comme une réponse à leurs préoccupations.
La ministre veut entraîner les autres pays riverains au nom de la protection de la Méditerranée, inscrite dans la convention de Barcelone. Il va lui falloir une grande force de persuasion. L’Italie, en particulier, a accordé des dizaines de permis d’exploitation du côté de l’Adriatique. Selon le rapport « MedTrens » publié en janvier par le WWF, le Fonds mondial pour la nature, les zones attribuées pour l’exploration et l’exploitation d’hydrocarbures, ou faisant l’objet d’appels d’offres, représenteraient 21 % de la surface de la Méditerranée. Et la production semble appelée à fortement progresser.
Que disent les écologistes:
Pascal-Canfin, ex–ministre délégué au Développement auprès du ministre des Affaires étrangères en France, dans le gouvernement Jean-Marc Ayrault, nommé le 20 novembre 2015 directeur du WWF France, s’est exprimé sur LCI le 15 février 2016 :
La Grande bleue, berceau de la civilisation, plus grande mer semi-fermée au monde, est la première destination touristique au monde et en France. Une marée noire aurait des conséquences bien plus graves à ce que l’on constate dans les océans qui se régénèrent relativement naturellement. Quand va-t-on prendre la mesure que cette tendance à la surexploitation de la Méditerranée est insoutenable.
La mer Méditerranée est un hotspot de lbiodiversité d’importance mondiale et une mer extrêmement vulnérable en raison de sa nature semi-fermée. En conséquence, le WWF considère que la mer Méditerranée ainsi que les engagements européens en matière de protection de la nature ou de l’atteinte au bon état écologique ne sont pas compatibles avec l’exploration et l’exploitation des hydrocarbures et demande de stopper en Méditerranée tout nouveau développement de ce secteur.
Carte des forages en cours d’exploitation en méditerranée. (Origine : « Objectif Transition)
Conclusion:
Il n’est pas nécessaire de faire appel à de grands analystes, pour conclure que nous sommes dans une situation d’attente, qu’en 2017, le gouvernement issu des élections présidentielles et législatives, aura à adopter une stratégie d’exploitation des ressources en hydrocarbures en Méditerranée, coordonnée avec les nations de l’aire méditerranéenne concernée par de possibles forages.